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Agence Picardie Presse
13 décembre 2006

Coup d'Etat de velours au Canada : le nouveau leader se veut rassurant

OTTAWA, 12 décembre 2006 – À Ottawa, rien ne rappelle l’événement le plus marquant de la scène politique nord-américaine de ces dix dernières années. Les rues enneigées sont presque désertes, les patineurs rivalisent de grâce et de talent sur le canal Rideau gelé, et la population se prépare activement à fêter Noël dans la pure tradition anglo-saxonne.

Pourtant, avant-hier au soir, trois jeeps de l’armée canadienne remontent Wellington Street à 140 kilomètres à l’heure avant de freiner en dérapant devant les vénérables bâtiments de Parliament Hill, qui regroupent les deux Chambres canadiennes en même temps que le siège du gouvernement fédéral. Contre toute attente, une bande d’hommes armés et cagoulés sortent des véhicules et, après avoir forcé les barrages de sécurité et abattu plusieurs gardes montés, font irruption dans le bâtiment central en passant par la boutique souvenir de la Tour de la Paix.

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En une heure, les terroristes ont neutralisé tous les vigiles et pris en otage l’ensemble du Cabinet fédéral, alors en séance plénière. Une équipe de la chaîne de télévision nationale CBC est admise dans l’enceinte des bâtiments gouvernementaux, et bientôt l’homme qui est à l’origine de ce coup de force se fait connaître du grand public.

Ce n’est pas la première fois que le gouvernement du Premier Ministre Stephen Harper, un conservateur originaire de la ville de Calgary, dans l’Alberta, fait la cible de ce genre de violence. En avril 2006, un régiment de mercenaires américains et chypriotes menés par Gonzague « Buddy » Virago, un parrain de la mafia new-yorkaise, tentent d’enlever le chef du gouvernement sur son lieu de travail, mais, persuadés que la capitale du Canada était Toronto et non Ottawa, ils sont appréhendés par la police montée ontarienne avant de prendre conscience de leur erreur.

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Cette fois-ci, cependant, le coup d’État est le fait d’un citoyen canadien, appuyé par l’essentiel des forces armées fédérales, ainsi que par une fraction importante de l’administration centrale, provinciale et territoriale du pays.

Il s’agit de Buster Murray, un général de l’Armée de terre connu pour ses opinions centristes, et qui avait à de nombreuses reprises exprimé son opposition à Stephen Harper, le Premier Ministre canadien, en poste depuis le 23 janvier 2006.

« Ceci est un coup d’État militaire. » a-t-il déclaré lors de son allocution, brève et bilingue, à la télévision. « À partir de maintenant, les cabinets et les parlements fédéral et provinciaux sont dissous pour toujours, et les élections aux divers niveaux de notre système politique sont annulées. Je serai votre chef suprême jusqu'à nouvel ordre. Bonne soirée »

Le coup d’État a fait l’objet d’une condamnation immédiate du Conseil de sécurité des Nations Unies, et un projet de résolution exigeant la démission de M. Murray est à l’étude au sein de l’Assemblée générale. Le Président de la République française a interrompu tout contact diplomatique avec le nouveau gouvernement canadien, et déclaré le dictateur et ses aficionados personae non gratae sur le territoire national. Quant au Président américain George W. Bush, il s’est déclaré « vivement préoccupé » par la situation politique de son voisin du nord, exprimant de « profondes inquiétudes » vis-à-vis de la « santé de la démocratie canadienne. »

Une condamnation purement formelle qui masque le désarroi profond de la communauté internationale face à ce coup d’État dans un pays occidental, membre de l’OTAN et surtout qui a toujours constitué un modèle de démocratie en même temps que l’un des « élèves modèles » de l’Organisation des Nations Unies.

Pourtant, la prise du pouvoir par Buster Murray ne semble guère soulever l’hostilité, ni même l’indignation, de la population canadienne.

« J’avais pas voté pour Stephen Harper de toute façon. » grommelle John Berswitch, sylviculteur interrogé par notre reporter dans un bar de la périphérie ottawaise. « Alors que ce soit lui ou un autre, moi, qu’est-ce que ça peut me fiche. »

« D’toute manière, renchérit-il après deux ou trois verres, on est gouverné par l’économie. La politique, c’est rien qu’des mots, ça compte pas. »

Une opinion qui, paradoxalement, semble être partagée par le nouveau chef du gouvernement canadien. « Ne comptez pas sur moi pour entreprendre de profondes réformes. » a-t-il déclaré hier sur Radio-Canada. « Les Nord-Américains ont depuis longtemps appris à se passer de l’intervention de l’État, et je ne vois pas en quoi mon arrivée au pouvoir y changerait quoi que ce soit. »

Il est vrai que la rhétorique du nouvel homme fort du régime est surprenante, et a de quoi tiédir les ardeurs des démocrates canadiens les plus confiants dans leur cause. « Je n’ai pas pris le pouvoir pour m’emparer de votre argent, de vos femmes ou de votre propriété. » a-t-il affirmé dans une série d’interviews données à la presse, à la radio et à la télévision. « Je ne compte ni vous laver le cerveau, ni vous torturer, ni même vous empêcher de quitter le territoire. Je ne poursuis aucun programme et je ne fais pas de politique. Tout ce qui m'intéresse, c’est le pouvoir. »

Bref, un ton rassurant qui contraste avec le lyrisme inquiétant d’un Fidel Castro ou d’un Mohammad Ahmadinejad. M. Murray lui-même revendique cette différence, et s’est prêté à un jeu de questions-réponses téléphoniques avec ses auditeurs de Radio-Canada afin de mieux expliquer ses spécificités.

« Je veux être un dictateur consensuel, un dictateur bénin. » a-t-il ainsi rétorqué à un adolescent de Laval (Québec) qui le soupçonnait de communisme. « Pas question pour moi de vous intégrer à un quelconque grand dessein. Au contraire, je souhaite exercer une influence aussi minime que possible sur vos vies de tous les jours. Je ne suis pas un psychotique comme Pol Pot ou Béla Kun. »

Interrogé par un chef d’entreprise torontois sur les politiques qu’il comptait mettre en place, il répond tout simplement : « Aucune. » « Comme tous les dictateurs, mon objectif est de rester au pouvoir aussi longtemps que possible. » reprend-t-il après quelques secondes de silence. « Mais pour ce faire, je ne vois pas l’intérêt de massacrer des centaines de personnes. Ce genre de truc, c’est peut-être bon pour des pays comme la Russie ou la Chine, mais en ce qui me concerne, je préfère recueillir l’assentiment de mon peuple pour assurer ma longévité. Et je ne vois pas de meilleure méthode, pour ce faire, que de le laisser tranquillement vaquer à ses occupations. »

« Je souhaite incarner un nouveau style de dictateur. » a-t-il conclu. « Il est temps que les autocrates tournent la page du totalitarisme et apprennent la modération, sans quoi le despotisme n’en a plus pour longtemps. »

D’après un sondage commandé par le Toronto Star, la cote de popularité du général Murray est passé de 10 à 95% à la suite de ces communications, et la spéculation contre le dollar canadien qui a fait suite au coup de force s’est interrompu, les marchés retrouvant une situation normale.

Ironiquement, le coup d’État a eu lieu le jour même de la mort de l’ancien dictateur chilien Augusto Pinochet, qui gouverna l’Argentine de 1973 à 1990 et constitue l’archétype du despote sanguinaire, archétype que répudie M. Murray.

« Le Canada est un vieux pays libéral. » explique Clifford Orwin, professeur de science politique à l’Université de Toronto, dans un long article publié sur le webzine de l’ONG américaine Human Rights Watch. « Les Canadiens ont appris que la démocratie, c’est plus que se rendre dans un bureau de vote pour déposer un bulletin dans une urne. La démocratie, c’est plus une atmosphère, un cadre de vie, voire un mode de pensée : la possibilité d’investir, de travailler, de voyager, de s'exprimer avec un minimum de contraintes. »

« Il faut donc isoler la définition traditionnelle du système démocratique en termes de processus (process), de la définition de la démocratie en termes de résultat (outcome). Dans certains pays où la société connaît de grosses fractures, comme la France ou l'Irak, le vote est un instrument de lutte ethnique et de lutte des classes, et c’est pourquoi les élections ont une place centrale dans la vie politique de ces pays. Au Canada, le consensus au sein de la population sur ce qui constitue la « bonne vie » était tel que le vote n’était plus qu’une formalité. Les différences entre les deux grands partis, le Parti libéral et le Parti conservateur, étaient d’ailleurs minimes. Au final, M. Murray n’a fait que débarrasser notre régime politique des simples formes de la démocratie, pour mieux nous en révéler le fondement. »

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Une thèse qui semble partagée plus ou moins consciemment par l’ensemble de la population canadienne. « Les mecs de l’ONU peuvent râler tant qu’ils veulent. » raille Jeff Preskins, un quidam interrogé par notre reporter au sortir d’un drive-in. « Mais regarde un peu les gens autour de toi. Ils ont un taux de chômage ridiculement bas, ils conduisent des grosses voitures, ils bouffent des hamburgers, et ce soir ils vont se louer un DVD pas cher au Vidéostore. Honnêtement, qu’ont-ils besoin de plus ? »

Par notre envoyé spécial à Ottawa, Jean Saintot.

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Commentaires
J
yo !<br /> lydé vit dans les ténèbres du moyen-âge, il n'a pas de blog. le mieux c'est que tu viennes en france pour acheter mon fanzine ;-) ou que tu lui écrives à elmoulouf@hotmail.com<br /> pr ta critique, je l'admets, et dès que j'aurai le temps j'essaerai les réecrire mes articles en plus court. en attendant je continue de tanner les journaux satiriques nationaux. à tte!
C
Cher Jean, <br /> Les articles publies sur ce site sont excellents. (j'aime beaucoup celui sur les bourgeois et les Luxembourgeois)<br /> mais pour avoir plus de chance de les voir publies, il faudrait qu'ils soient plus courts, a mon avis. <br /> (essaye de diviser par deux la longeur de chaque article)<br /> bonne continuation<br /> Claire<br /> <br /> PS : ou est-ce que je peux lire des textes de Lyderic?
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